NOM : Kiedis. PRÉNOM(S) : Julian DATE ET LIEU DE NAISSANCE : Nashville, le 23 décembre. ÂGE : 41 ans. ORIGINES : américaines et inconnues. STATUT CIVIL : C'est compliqué. ORIENTATION SEXUELLE : Hétérosexuel. PROFESSION/ETUDES : journaliste musical et vendeur dans un supermarché pour arrondir ses fins de mois. GROUPE : open the mind.

~ comment as-tu découvert la légende de l'avenue Stanley Hall ? C'était il y a environ 10 ans, quand j'ai débarqué à Southington. J'étais complètement claqué, je venais de parcourir des kilomètres et des kilomètres dans un vieux van pourri et j'avais à peine de quoi me payer une chambre d'hôtel. Mais, comme à mon habitude, je me suis dirigé vers le seul endroit de la ville où j'étais sûr de me sentir chez moi: le bar. Et c'est là qu'un mec bien éméché, une bonne demi-douzaine de verres vides alignés devant lui, me raconta cette légende. A l'époque je m'en foutais un peu de ces vieilles histoires à dormir debout et c'est toujours le cas d'ailleurs. ~ penses-tu que cet événement est réellement eu lieu ? Ce genre de légendes c'est comme le père-noël, la petite-souris ou le lapin de Pâques. Elles servent uniquement à plumer les gens trop cons pour se rendre compte que la seule part de vérité dans ce genre d'histoires tient en un mot: légende. Je ne prétends pas avoir mieux à faire que d'écouter ces débilités, mais j'ai sûrement pire à faire. ~ quelle est la légende urbaine qui t'effraye le plus ? Celle de ma mère mon gars, j'te jure elle est terrible. Non, plus sérieusement, si vous cherchez à plumer un petit pigeon sans cervelle, passez votre chemin car je ne suis pas celui que vous cherchez. J'ai déjà du mal à croire en ce que je suis et en ce que je vis, alors croire à ces vieilles légendes qui ont pris la poussière au fond du placard de vos grands-parents, sans façon.

La vie ne te fera pas de cadeaux mon gars, alors t'as intérêt à trouver le moyen de t'en sortir autrement tu te feras bouffer tout cru, c'est moi qui te le dis mon petit gars. Mon premier et dernier souvenir d'enfance se résume à ces seules paroles prononcées par mon père lors des funérailles de ma mère. Je devais avoir 6 ans tout au plus. Deux mois plus tard, mon cher paternel mettait les voiles, abandonnant son seul et unique fils. J'ai été recueilli par la soeur de ma mère, Katya, qui m'éleva du mieux qu'elle put. Ma mère ? Je n'ai aucun souvenir d'elle, juste quelques anecdotes que m'a racontées ma tante. Il paraît qu'elle était vraiment très belle, d'une beauté rare et précieuse. J'ai hérité de ses yeux et de son côté sensible apparemment. Pour ce qui est de mon père, le seul héritage qu'il m'a transmis, c'est son penchant pour ce liquide puissant qu'on appelle alcool. Pour le reste, j'ai dû me construire tout seul, comme un grand, du coup les bases de mes fondations ne sont pas des plus stables car je manquais cruellement de matos, à l'époque.

A l'âge de 16 ans, je décidai que j'en savais assez pour me débrouiller tout seul. Je quittai donc ma chère tante en lui laissant ces quelques mots d'adieu : « Je m'en vais Katya. Je te remercie pour ce que tu as fait pour moi, mais maintenant j'ai besoin d'aller voir ailleurs, je veux voir le monde, je veux le ressentir et le vivre. Adieu, Julian. » J'étais sacrément dramatique à l'époque.
Me voilà donc parti à la découverte du monde. Je m'imaginais voyager de villes en villes, sans aucune attache, libre comme le grand faucon qui déploie ses ailes dans l'immensité du ciel. Je me voyais déjà bohémien vivant d'aventures et d'eau fraîche, avec pour seul guide ce petit feu qui brûlait à l'intérieur de moi. Mais je fus très vite rattrapé par la réalité. Celle-ci me frappa en plein dans le ventre, un coup sec et dur, qui te donne la nausée pour le reste de ta vie. Les grands espaces verts et les longs voyages en bagnole laissèrent très vite place à tout autre chose. Misère, galère, drogues, alcool, beaucoup d'alcool, et de la violence. Voilà à quoi se résuma ma vie pendant dix ans. Dix dures et longues années à te frapper la tête contre le mur pour t'empêcher de la perdre. Dix années à te demander qu'est-ce que tu vas bien pouvoir faire de ta peau. Dix années à essayer de donner un sens à ta vie, alors que tout dérapait autour de toi.
J'avais jeté l'ancre dans la petite ville de l'Etat du Connecticut qu'est Southington depuis plus un certain temps déjà lors que ce petit incident, comme je m'amuse à l'appeler, arriva. A cette époque je ne valais pas un sou (je ne prétends pas que ça a changé depuis) et j'étais complètement rongé par la drogue et l'alcool. C'était un soir comme les autres, j'avais descendu pas mal de verres lorsqu'un pauvre type vint me narguer. Je n'ai même pas très bien compris comment, mais en un rien de temps je me suis retrouvé sur lui, en train de l'étrangler. Pour le moment je m'en sortais plutôt bien car le pire restait à venir. Les choses se sont en effet compliquées lorsqu'un flic est intervenu et que c'est contre lui que j'ai extériorisé ma rage de vivre. Et hop ! Voilà que je me ramassais deux ans de prison pour trouble à l'ordre public et atteinte aux forces de l'ordre. Il ne manquait plus que ça...

De la musique, encore et toujours de la musique. Voilà ce qui me permit de maintenir ma tête hors de l'eau et de ne point sombrer. J'en écoutais jours et nuits, je pensais musique, je parlais musique, je rêvais musique. Je gardais toujours avec moi ma collection de précieux cds qui furent mes seuls fidèles compagnons de route.
J'étais sorti de prison depuis quelques jours. Je me décidai à rester un certain temps à Southington. Mon petit séjour en prison m'avait vraiment changé et je n'avais plus la force de repartir sur la route. Et puis, il fallait bien que je pose bagage un jour.
Un après-midi, alors que j'écoutais What Is And What Should Never Be des Led Zeppelin, j'eus une sorte de révélation. Voilà ce que je voulais faire de ma vie : de la musique. Je me débrouillais plutôt bien à la guitare et je savais aligner quelques notes au piano. Je n'étais pas un prodige, loin de là, mais j'étais passionné, et motivé aussi. Je me mis en quête d'un boulot qui me permettrait de me faire un peu de fric et de m'assurer de ne pas finir par faire la manche sous les ponts. Je décortiquais tous les journaux de la région depuis des semaines et des semaines lorsqu'une annonce retint mon attention. « Petit journal indépendant basé à Southington recherche critique musical. » Il ne m'en fallu pas plus pour me décider : sans attendre, je me présentai aux bureaux de ce petit journal local. Je n'avais rien de l'employé modèle mais je m'en fichais pas mal. Au point où j'en étais, je n'avais pas grand chose à perdre. Je réussis quand même à décrocher le poste. J'étais heureux comme un pape. Cependant, je me rendis très vite compte que ce petit poste de journaliste ne suffirait pas : j'étais très mal payé et j'avais besoin de plus d'argent. Je me décidai à travailler dans un supermarché quelques soirs par semaine, pour arrondir les fins de mois. Et je peux vous dire que j'ai vraiment bien fait de choisir ce petit boulot supplémentaire à l'époque car il m'a permis de faire connaissance avec la plus belle créature de ce monde. Oui je vous le promets.

Excusez-moi, vous pourriez me donner la bouteille de Krug s'il vous plaît? Je me retourne et me retrouve face à la plus belle femme de l'histoire de l'humanité. Le problème c'était qu'elle devait être âgée d'une vingtaine d'années, tout au plus. Mais ce petit détail, mon coeur ne l'a pas vraiment pris en considération. Et voilà que je flashais sur cette jeune blonde dont le visage me paraissait étrangement familier. Un cru à 261$, décidément on ne se refuse rien. Mais vous n'êtes pas un peu trop jeune? Je voulais confirmer mes soupçons, mais évidemment elle me répondit qu'elle venait d'avoir 21 ans, comme par hasard. Voilà, il ne m'en fallut pas plus, elle m'avait fait craquer. A la caisse, je sors le grand jeu. J’attrape un stylo et note mon numéro sur la bouteille. Je vous l'offre. Pensez à moi quand vous serez bourrée ce soir! J'étais vraiment pathétique, ça faisait longtemps que je n'avais plus dragué, du coup j'avais un peu oublié comment faire. Mais apparemment mon petit numéro a bien marché car, le soir-même, elle m'appela.
Cette nuit, je ne l'oublierai jamais. On était vraiment bien bourrés et on s'abandonna dans les bras de l'autre. Elle était jeune, elle était fragile, elle était magnifique. Peu à peu, elle se dévoilait à moi, aussi bien physiquement que personnellement. Entre deux caresses, elle me révélait des informations sur elle, des morceaux de son histoire que je récoltais précieusement entre mes mains. Elle m'avoua entre autres qu'elle n'avait pas encore vingt-et-un ans et qu'elle m'avait menti pour pouvoir acheter de l'alcool. J'en étais sûre mais je ne lui en voulais pas. Comment lui en vouloir d'être entrée dans ma vie ? Elle était la plus belle chose qui me soit arrivée depuis... depuis même toujours peut-être.
Je n'avais pas prévu de tomber amoureux à ce point d'une fille, et encore moins d'une qui aurait pu être ma propre fille. Mais je n'y pouvais rien, ce petit bout de femme avait débarqué dans ma vie et je n'étais pas prêt à laisser partir de si tôt. Parfois je m'inquiétais pour elle, je me demandais ce qu'elle pourrait bien faire d'un gars comme moi. Je n'avais rien à lui apporter, je n'étais qu'un vieux déchet bousillé par la vie. Et tu vas dire quoi à tes parents? Je sors avec un ex-taulard qui pourrait être mon père? Je lui avais sorti ça comme ça, sans réfléchir. Maintenant que c'était sorti, je ne pouvais pas revenir en arrière. Peut-être qu'elle ne comprenait pas, peut-être qu'elle ne comprendra jamais. Je tenais à elle, je ne voulais pas la perdre c'était tout. Et dans 10 ans, tu décideras de me quitter pour un gars plus jeune. Dahlia, tu as 20 ans, j'en ai le double. Puis elle s'en alla, me laissant seul avec ce tonnerre à l'intérieur de moi. Je la regardais partir et je me disais que jamais plus je n'avais envie de la voir partir comme ça.
Six ans ont passé depuis. Au boulot, tout roulait. Les gens m'aimaient bien il me semble et j'arrivais à pondre des papiers vraiment pas mal. Je m'étais même fait une amie. Elle s'appelle Angie et c'est la fille la plus loufoque que j'ai rencontrée. Mais elle est géniale et puis c'est vrai que ça fait du bien de pouvoir se confier à quelqu'un. Mais je savais qu'elle risquait d'être mal vue par Dahlia. Alors je les ai présentées pour ne pas qu'il y ait de malentendu. Au début ma petite chérie ne l'aimait pas trop, voyant en elle une rivale. La situation ne s'améliorait pas trop, déjà que c'était plutôt tendu entre nous. Mais elle a très vite compris que c'était elle que je aimais et que pour rien au monde je ne voudrais la tromper. Angie était ma seule et unique amie en ville, alors elle l'accepta et finit même par apprécier sa compagnie.
Six ans, voilà six ans qu'on est ensemble. Six ans à s'aimer, à se déchirer. Plus le temps passe et plus ce combat sévit à l'intérieur de moi. Mais je tiens trop à elle. Cette nana, elle est tout ce que je suis à présent, je donnerais tout pour qu'elle soit heureuse. Malheureusement, j'ai déjà du mal à me rendre heureux moi-même. Des fois je me dis qu'elle pourrait trouver bien mieux ailleurs, mais je suis tellement égoïste que je ne pourrais probablement jamais la laisser partir, à mois qu'elle ne le veuille vraiment.